Portrait de Chantal Chomel, ancienne vice-présidente du Crédit Coopératif
Les formes coopératives sont plus que jamais nécessaires. Elles constituent des outils économiques, territoriaux et sociaux, vecteurs d’émancipation, qui permettent aux gens de travailler collectivement sur le moyen/ long terme tout en freinant l’appétit de lucrativité
Chantal Chomel grandit à Paris dans une famille catholique de gauche. De cette culture, elle conserve des engagements personnels envers les plus démunis. Très tôt elle comprend que le travail est un levier d’émancipation incontournable pour les femmes. Vivant à Briançon, elle travaille pour l’ANPE et l’AFPA, ce qui la met en contact avec l’économie des Hautes Alpes, tirée par le tourisme. Elle y passe son diplôme d’initiateur de ski de fond. Ce sont aussi les années où naissent ses enfants.
En 1980, Chantal Chomel entre au Centre d’Information sur les Droits des femmes et des familles – (CIDFF) de l’Isère. Elle s’occupe d’abord de l’antenne Femmes de la mission locale, puis devient la directrice du CIDFF de l’Isère. Elle habite alors le Vercors, et participe à la fondation d’une école de musique itinérante. En 1985, elle intègre le CNIDFF à PARIS. Ces années donneront naissance à de grandes amitiés qui nourrissent une vie avec ses collègues femmes qui partagent la même aspiration émancipatrice. Également divorcée, elle élève seule ses enfants.
En 1987 elle rejoint la coopération jusqu’à la fin de sa vie professionnelle : le GNC (Groupement National de la Coopération) d’abord, comme juriste, puis en 1991, la Délégation interministérielle à l’ES, dont le délégué est alors François Soulage. Elle y rencontre aussi Marcel Hipszman, qui deviendra plus tard son mari. Quand en 1994 la confédération de la Coopération agricole lui propose la direction des affaires juridiques et fiscales, qui inclut également la gouvernance, elle accepte et y reste jusqu’en 2016. Tous ces milieux sont très masculins et peu de femmes ont des postes de responsabilité.
Elle participe aux travaux de Coopératives Europe, de l’ACI, et du COGECA. Elle est aussi experte aux travaux préparatoires à la recommandation de 2002 de l’OIT sur les coopératives. En France, elle est membre du Conseil Supérieur de la Coopération et met sur les rails le HCCA- Haut conseil de la coopération agricole. Elle a été membre du collège de l’Autorité de la Concurrence de 2014 à 2019 et administratrice et membre du bureau de l’ESA (Ecole supérieure d’agriculture d’Angers). En 2010, elle est élue administratrice du Conseil d’administration du Crédit Coopératif au titre des particuliers et le restera jusqu’en 2022, en ayant assuré la présidence du Comité des risques et étant devenue vice présidente.
Elle est actuellement membre du bureau de l’Académie d’agriculture de France. Elle siège à la C.A.D.A, commission d’accès aux documents administratifs. Elle est enfin membre du comité de rédaction de la RECMA.
Son parcours
- 2010-2022 : Vice-présidente, Crédit Coopératif (fin du mandat le 1er juin 2022)
- 1987-2016 : Les années dans la coopération : au GNC, puis à la Délégation interministérielle à l’Economie Sociale et enfin à Coop de France.
- 1980- 1987 : Secrétaire générale, Centre d’information sur les droits des femmes de l’Isère, puis à Paris
- 1977-1982 : Assistante, Université de Sciences Sociales à Grenoble 1975 : DES Droit Privé à Aix en Provence
Engagement dans l'ESS
L’essentiel de son parcours professionnel s’est réalisé dans l’ESS- avec quelques incursions dans le secteur public. L’ESS c’est à la fois un projet, des secteurs d’activité variés, de la coopération agricole à la santé en passant par les mobilités douces ou le secteur financier, et des rencontres de travail avec des personnes qui partagent le même engagement collectif pour un monde plus juste et plus durable. Le secteur coopératif lui semble particulièrement intéressant, en raison de sa diversité mais aussi de son adossement à un corpus juridique construit qui fixe des limites à l’appétit lucratif. La structure même de la coopérative, son ancrage territorial fort et l’absence de pression boursière favorisent une approche moyen/long terme.
PROMOTION ET AUTONOMIE DES PERSONNES : GOUVERNANCE ET FORMATION
Pour Chantal Chomel, “la coopération est plus qu’un projet de transformation sociale, c’est aussi un projet de promotion et d’émancipation individuelle et collective des personnes qui y travaillent”. De cette conviction découle son investissement dans la formation des élus et dans la gouvernance notamment en partenariat avec l’ESSEC. Elle initie le premier guide de gouvernance pour les coopératives agricoles, régulièrement réédité et enrichi depuis.
PROMOTION DE LA COOPÉRATION
A l’initiative de François Soulage, Chantal Chomel travaille sur la loi du 13 juillet 1992 de modernisation des entreprises coopératives avec deux objectifs : rendre le statut coopératif plus attractif en levant quelques contraintes, et renforcer le tronc commun entre les divers statuts. C’est une expérience professionnelle et humaine passionnante, car elle porte sur l’ensemble du processus : les travaux préparatoires en concertation avec les mouvements coopératifs, le passage en conseil d’Etat, le débat au Parlement et les décrets d’application. Elle travaillera avec François Espagne- immense érudit sur le droit des coopératives dans le temps et dans l’espace, alors secrétaire général de la CGSCOP- ou Jacques Moreau, alors PDG du Crédit Coopératif, et à Bruxelles sur le règlement européen sur la société coopérative européenne.
Outre ses activités d’enseignement dans plusieurs universités, Chantal Chomel co-écrit un livre avec des collègues enseignants-chercheurs sur les coopératives agricoles. Elle est d’ailleurs la marraine d’une promotion de master 2 de Droit Rural à l’Université Mâcon-Lyon. Construire des liens avec la recherche sur les coopératives et l’ESS a été un de ses axes de travail constant. C’est aussi le sens de son engagement à l’ESA d’Angers compte tenu de l’importance de l’enjeu des transitions agro écologiques et climatiques.